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DISRUPTION - Retour à l'accueil

Temps de lecture 7-9 minutes

J'ai décidé de remettre en cause toute ma façon de produire mes oeuvres. Ça a toujours été un point de crispation chez moi, je ne veux plus faire intervenir mon ordinateur dans la chaîne de production. Cet outil m'ennuie et ne m'a jamais vraiment excité.

Mon ordinateur me sert à faire plein de tâches variées, comme écrire, lire sur le web et faire des recherches, regarder des films ou écouter de la musique, mais je préfère avoir une machine dédiée pour une chose aussi spécialisée que manipuler des sons.

Je ne considère pas les ordinateurs comme fiables. Ils bugguent, plantent, effacent et perdent des travaux importants. La seule chose pour laquelle je trouve mon ordinateur performant c'est pour l'acquisition des sons. Il permet d'automatiser des tâches en parallèle et donc de gagner du temps sur des choses répétitives et pénibles. Je peux donc facilement ripper du son en ligne de commande et tout mettre dans un dossier en attente d'un premier tri.

Ma façon de travailler est la suivante: à l'air de l'analogique prédominant je me rendais chez le disquaire, faisait une pile de disques à écouter puis procédais à une écoute rapide par disque - les premières mesures, 10 secondes à peu près. C'était la partie fastidieuse de mon travail.

À l'ère numérique tout est désormais disponible en ligne. Youtube est le plus grand dealer de sons ayant jamais existé et avec les bons outils il est possible de prendre ce dont on a besoin pour travailler.

J'utilise yt-dl pour ripper le son qui m'intéresse. C'est rapide, le résultat est de bonne qualité et ça ne m'oblige pas à passer par un site tiers en ligne. Tout se fait en local sur ma machine dans un terminal.

Mon ordinateur est peu puissant, c'est un Thinkpad reconditionné, robuste et fiable mais pas une machine de guerre qui tourne sous Gnu/Linux au lieu de Windows.

Audacity n'est plus le logiciel simple, fiable et robuste des débuts. Comme tout le reste de l'informatique au fur et à mesure des années, il s'est complexifié avec de nombreuses "features" discutables qui l'ont rendu lourd et gourmand en ressources CPU. Il est en est même devenu instable. Les repreneurs d'Audacity semblent vouloir en faire un DAW. J'ai une aversion pour les logiciels de type Cubase ou Ableton Live qui sont des usines à gaz qui nécessitent des machines toujours plus puissantes pour tourner. J'ai donc décidé de travailler autrement.

Mon schéma cognitif d'autiste a tendance à se crisper sur des habitudes à partir du moment où elles m'apportent un certain bien-être. Du coup, j'ai du mal à explorer d'autres façons de faire, et qui pourraient peut-être m'apporter encore plus de satisfaction. C'est paradoxal car la nouveauté me stimule.

Jusqu'à présent j'utilisais la SP 404 MKII comme un processeur d'effets. Tout le travail de découpage et d'assemblage des sons étaient faits dans Audacity. Un travail linéaire et visuel qui me permettait une précision micrométrique du découpage et du collage.

Avec la SP 404 le travail d'édition se fait à l'oreille essentiellement et un peu de manière visuelle dans l'éditeur audio rudimentaire de la machine. Pas très précis et surtout plus long car en temps réel car on ne peut pas appliquer un effet sur un son ou faire un copier/coller d'un segment sans le jouer. Ça me rappelle quand je travailler sur des magnétos à bandes. Néanmoins, c'est un travail plus précis que ce que j'ai pu faire avec une paire de platines par le passé. C'est une toute autre façon de travailler qu'avec un ordinateur, même si une machine hardware est un ordinateur. C'est juste que contrairement à mon Thinkpad le hardware et le software de la SP 404 sont optimisés pour fonctionner parfaitement ensemble et pour faire une seule chose, du son, même si on ne fait pas l'économie de quelques bugs. Mais l'équipe chez Roland rectifie assez vite les problèmes.

Avec Audacity et l'affichage d'un son complet sous sa forme d'onde je pouvais embrasser l'intégralité d'un morceau dans une fenêtre et en repérer facilement les différents passages - refrains, couplets, breaks - permettant un travail précis et rapide. Avec la SP 404, on est obligé de travailler de manière empirique, plus lentement, mais ça permet d'obtenir quelque chose de plus spontané et peut-être aussi plus expressif, plus vivant.

Je souhaite aussi en finir depuis quelques années avec l'influence qu'a sur moi le turntablism et son esthétique particulière qui n'évolue plus.

Certe le scratch est très expressif, dynamique et organique mais ça revient à faire peu ou prou toujours la même chose. Et d'ailleurs toutes les vidéos que je regarde sur le web, même les plus récentes, ne montrent rien de nouveau. Même les sons servant à scratcher sont les mêmes.

Le pompon étant le portablism avec ses platines en plastique à 300 euros auxquels il faut rajouter toutes sortes d'accessoires pour qu'on puisse faire quelque chose de sérieux avec. Autant s'acheter une platine à entraînement direct pour le même prix.

Alors bien sûr on ne pourra pas se filmer en train de scratcher n'importe où.

En plus pour scratcher convenablement sur ces platines on a besoin de disques de 7" avec une gravure spéciale pour que l'aiguille ne saute pas trop pendant les manipulations. Des disques qui compilent des sons vieux de 40 ans entendus mille fois. C'est juste de la consommation de niche qui s'inscrit dans un "lifestyle accessoirisé DJ". C'est du contenu de réseaux sociaux, c'est de l'instagrammable. Il n'y a qu'à voir le milliard de vidéos de pseudo DJs au niveau oscillant entre médiocre et à peine moyen sur Youtube pour s'en convaincre.

C'est en regardant des vidéos de Cut Chemist avec son set à une platine plus une pédale looper que je me suis rendu compte que le sound design du turntablism c'est comme le Jazz classique, c'est une forme esthétique qui n'évolue plus. Le Hip-hop au travers du Rap est devenu le nouveau mainstream. Un fond sonore comme un autre.

Facile à écouter, starisant le moindre de ses acteurs selon les mêmes principes qu'une boîte de céréale ou qu'une bagnole, tout est dans l'attitude et la marchandisation. Une prolifération d'arrivistes qui n'ont rien inventé et se contentent de recycler ce que d'autres ont réellement inventé.

Je ne parle pas là de Cut Chemist, de DJ Shadow, DJ Kid Koala ou encore DJ Krush qui sont désormais des survivants du son authentique du Hip-hop mais de tous ces copieurs sans idée qui se croient DJs parce qu'ils jouent un Amen break et pose des scratchs laborieux dessus.

Mon désir est donc de trouver un sound design qui m'est propre avec les outils à ma disposition. La SP 404 a des limitations. Contrairement à un contrôleur émulant une platine tourne-disque je ne peux pas scratcher et faire certains effets de platine avec. Mais je peux faire n'importe quoi d'autre et modifier le son en profondeur.

Ce n'est qu'une question de travail, de maîtrise, de recherches, d'accidents heureux et d'itérations nombreuses.

Texte diffusé sous Licence Art Libre


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